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CULTURE FLASHBACK: Judge Dredd

Back to basics

Bienvenue dans un monde sans limite ni frontière. Un monde où les vitres se cassent à la main et où la moindre balle perdue peut provoquer des catastrophes entières. Culture Flashback vous emmène ce mois-ci en territoire hostile, au royaume du muscle, du sang et des répliques à l’emporte pièce. Au programme, l’adaptation vacharde d’un monument britannique. Bienvenue dans l’univers magique des films d’actions 90’s.

 

« How do you plead ?– Not guilty ? – I knew you’d say that. » Dredd.

S’il y a bien une chose que l’on peut retenir de la tumultueuse histoire des mariages arrangés entre comic book et cinéma, c’est que la réussite de certains projets est intimement liée au contexte de l’époque dans lequel ils s’inscrivent. Si le Superman de Richard Donner ou le Batman de Tim Burton demeureront à jamais des oeuvres fondatrices et marquantes dans le genre, c’est qu’ils ont, chacun à leur manière, su dynamiter et détourner les codes de leur temps (l’insouciance contre le sérieux des 70’s pour l’un, la noirceur contre le ramdam coloré des 80’s pour l’autre). Plus de 20 ans après, on ne peut pas dire que Judge Dredd soit quant à lui resté dans les annales. Conspué à juste titre à sa sortie, le bousin a pourtant quelques arguments à faire valoir. Tentative de réhabilitation.

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Après le succès critique et public de Demolition Man (1993) qui l’a replacé au centre de la carte du cinéma mainstream mondial, Sylvester Stallone se cherche un nouveau projet pour asseoir son hégémonie et distancer pour de bon son grand rival autrichien, Arnold Beckenbauer (Last Action Hero, mon amour). Quand les producteurs de Hollywood Pictures (Disney)  lui proposent le rôle-titre de l’adaptation de Judge Dredd , le comics cultissime de John Wagner et Carlos Ezquerra, Sly y voit sa nouvelle poule aux oeufs d’or et les fans se frottent les mains.  Erreur fatale, ambiance scandale, danse de vandale.

L’histoire de Judge Dredd prend place au XXIIIème siècle, dans une Amérique post-nuclear war où les populations se sont rassemblées dans des mégalopoles gigantesques pour survivre. Pour faire face à une criminalité au bord de l’explosion, les dirigeants de ces Mega cities instaurent un nouveau système judiciaire et créent une nouvelle entité d’hommes de loi : les Judges, à la fois juges, jurés et bourreau. Dredd (Stallone), le plus emblématique d’entre eux, va se retrouver bien malgré lui pris au piège par son ennemi intime l’ex Judge Rico (Armand Assante, l’oeil fou).

La loi c’est lui.

Autant le dire d’emblée, le développement de l’intrigue est foiré dans les grandes largeurs. Si les fondamentaux du récit déployé dans le comics sont relativement respectés, ils volent très vite en éclats devant les impératifs de studio. Même dans la peau d’un anti-héros badass et torturé qui avait tout pour lui convenir , Stallone n’arrive pas à faire autre chose que son numéro habituel,  à grand coup de tatanes et de punchlines beuglées (le fameux « I AM THE LAAAAAW »). Pis, il se voit affublé d’un comic relief (l’insupportable Rob Schneider) qui n’a pour seul utilité que de contrebalancer la violence du film afin de lui faire décrocher un PG-13 (raté, pas de bol). Judge Dredd suit au final les rails du blockbuster calibré 90’s, avec son méchant bas-du-front, ses affrontements balourds et ses explosions foirées,  alors qu’il avait tous les ingrédients pour transgresser ces codes. Mais c’est justement là que réside en définitif le charme du film, avec le recul des années.

Passé la déception de ne pas retrouver les éléments les plus importants du comics original (la violence outrancière, l’univers punk et brutal) Judge Dredd doit s’appréhender aujourd’hui  pour ce qu’il a toujours été: un actioner décérébré et couillu qui lorgne joyeusement vers la série B. Il faut voir Stallone moulé dans son lycra Versace surmonté d’attribut clinquants balancer des répliques du type « Visée auto-guidée, turbo-sulfateuse  »  ou « Je t’exploserais moi-même la cervelle personnellement » pour replonger dare-dare dans le paradis perdu de l’enfance.

Dans le même ordre d’idée, la représentation de Mega City One, sorte de techno-cité aux rues fumantes et cracras nous renvoie à un temps où le soin apporté aux décors physiques était une notion capitale dans la recherche d’authenticité et de crédibilité. Le parti-pris de Danny Cannon d’en faire un univers à la Blade Runner est tout à fait louable et donne au film un cachet et une personnalité intéressante. Même s’il n’arrive pas à la cheville du chef-d’ oeuvre de Ridley Scott où au niveau d’illustres prédécesseurs tel que Robocop ou Total Recall, le film a le mérite de s’inscrire dans leur sillage, sans en faire des tonnes.

Alors certes, le fanboy de la première heure de ce monument graphique qu’est Le Judge Dredd de 2000 AD aura dû attendre 17 ans de plus pour voir son fantasme se réaliser à l’écran (l’incroyable Dredd de Pete Travis) et a de quoi l’avoir mauvaise.  Mais pour les enfants des années 90, le film demeure un plaisir (à peine) coupable.  Parce que revoir Judge Dredd en 2017, c’est l’assurance de se fendre la poire, pour peu que l’on ait une poignée de potes et un pack de bières à ses côtés. La nostalgie camarade !

JUDGE DREDD, de Danny Cannon (1995).  Avec Sylvester Stallone, Armand Assante, Rob Schneider, Max von Sydow.

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